Tout plutôt qu'être moi

Soumis par HashtagCeline le sam 10/02/2018 - 10:59
Un texte sur la dépression contre laquelle l'auteur a essayé de se battre. Malheureusement, en vain...
#UnTristeSort

En ouvrant un roman, on a bien souvent envie d’en savoir plus sur son auteur. Dans le cas de Ned Vizzini, j’ai découvert une bien triste histoire. Jeune écrivain prometteur, il était aussi dépressif depuis de nombreuses années. Sa dépression, il a cherché à la combattre. Coucher son mal-être sur papier a sans doute été une sorte de thérapie. Mais, la dépression profonde, ça vous ronge et c’est souvent difficile d’en sortir totalement. Ned Vizzini s’est jeté du haut d’un immeuble à 32 ans privant ses proches de sa présence et ses lecteurs de romans puissants comme celui dont je vais vous parler.
 

#UnSujetFort

Craig a 15 ans. C’est un garçon timide et peu sûr de lui mais à son âge, finalement rien de bien étonnant.  Il vit au sein d’une famille unie et aimante. Il “glande” souvent avec Aaron avec qui il fume un peu d’herbe et fantasme sur Nia, la petite amie de celui-ci. 
Il s’est fixé un objectif : intégrer l’Executive Pre-Professional, “une nouvelle prépa de haut niveau qui a pour vocation de former les leaders de demain.”
Désormais l’essentiel de son temps libre, Craig le consacre à réviser pour réussir ce fameux concours d’entrée. Cela devient presque obsessionnel.
Puis, la réponse arrive : il est accepté. Cet événement, récompensant tant d’efforts, va enclencher sa descente aux enfers. 
Son mal-être latent jusqu’ici gérable s’intensifie. Au sein de cette école, il ne se sent pas à la hauteur. Il va perdre pied.
Des troubles apparaissent alors. Il a du mal à s’alimenter et finit souvent par vomir. Certaines de ses pensées tournent en boucle. Une fois le processus d’angoisse mis en route, impossible de le stopper. Tout son quotidien lui semble compliqué, et il qualifie de “tentacules” des choses simples pour les autres mais qui pour lui sont devenues insurmontables. Il entend aussi des voix. Enfin une plus précisément qui lui parle de façon militaire.
Et le comble, c’est qu’il n’arrive plus à se mettre au travail. 
Il se sent complètement dépassé et perd toute confiance en lui. Il finit par aller voir un spécialiste qui lui prescrit un traitement. Mais Craig l’arrête un peu trop tôt. C’est la rechute.
L’adolescent s’enfonce à nouveau. Jusqu’à ce qu’un soir, il prenne une décision lui offrant à son avis la seule et unique issue : il va se suicider.  
Avant de sauter le pas, il a quand même un doute et appelle SOS Suicide. A l’autre bout du fil, son interlocuteur sait trouver les mots. Il explique à Craig qu’il est en situation d’urgence et qu’il doit aller à l’hôpital. Contre toute attente, Craig suit ce conseil. Il se rend aux urgences et se fait interner volontairement. 
Commence alors le récit de son séjour au Nord Six, un service psychiatrique où sont regroupés adolescents et adultes.
 

#PasFacile

Ce n’est pas évident de parler de ce livre. A cause du sujet sans doute ou de l’histoire de l’auteur… ou peut-être à cause de l’opposition entre le message de ce roman (la vie) et ce que Ned Vizzini a fini par choisir (la mort). C’est idiot mais je n’ai pas pu m’empêcher de faire le parallèle avec l’histoire personnelle de l’auteur tout au long de ma lecture.

Et mine de rien, je suis un peu partagée. J’ai aimé ce livre, ça oui ! Mais certaines choses m’ont un peu dérangée.

Commençons par les aspects qui m’ont fait aimer Tout plutôt qu’être moi.

C’est un roman, malgré ce que l’on peut imaginer, plein de vie mais aussi d’espoir. Si Craig semble perdu et que sa dépression le ronge, son histoire nous prouve que l’on peut essayer de s’en sortir, qu’il faut se faire aider et qu’il y a toujours une autre solution. Même si on pense parfois le contraire. 

Ned Vizzini a aussi pris le parti de nous montrer la psychiatrie de façon positive. Déjà, Craig est plutôt bien pris en charge. 
Le service où il se fait interner fait figure de bulle, presque de havre de paix (mentale), pour Craig. Les gens y sont malades, différents mais rassurants pour notre héros. Au moins, ils sont comme lui, ils ne se moquent pas. Personne ne le regarde de travers et Craig peut enfin assumer son mal être sans avoir peur qu’on le juge. La pression se relâche.

Le regard que le lecteur est amené à poser sur la folie est ici plutôt bienveillant. On est touché par chaque patient qui traîne son lot de problèmes ou son passé difficile. Même si pour certains, on n’en saura pas trop. Les soignants ne sont jamais malintentionnés. Les patients ne sont pas drogués à outrance, la plupart sont lucides. J'avais lu des romans où ce n'était pas le cas...

Les liens que Craig va tisser avec les autres personnes internées occupent une place centrale dans ce roman. On oublie presque parfois que nous sommes en plein coeur d’un service de psychiatrie.
C’est intéressant ce point de vue je trouve.

De plus, Ned Vizzini nous dresse un tableau sombre mais réaliste de l’adolescence et nous donne matière à réfléchir à tout ce que l’on ressent à cette période. C’est un moment crucial où l’on doit déjà poser les bases de sa vie future alors que l’on ne sait rien de ce qui nous attend et que l’on est bien souvent incapable de prendre des décisions. Et finalement, on se rend compte que beaucoup d’adolescents dans l’entourage du héros ont connu et connaissent encore des phases de déprime ou dépression.

Et enfin, ce roman n’est pas non plus dénué d’humour. On se moque (jamais méchamment) des travers des uns et des autres. On s’amuse plus de situations, que des gens. Et Craig, s’il n’était pas si mal, est un garçon plutôt piquant. Il faut juste qu’il s’en souvienne.

En ce qui concerne les aspects qui m’ont un peu gênée...

Paradoxalement, c’est un peu aussi à cause de ce que j’ai évoqué plus haut que ce roman m’a perturbée. 
En effet, à l’inverse, est-ce que tout peut être aussi facile ? L’internement, les prises de conscience de Craig, ses changements… j’ai un peu eu l’impression que finalement, tout s’arrangeait trop facilement. 
Je ne dis pas que je voulais que le héros reste empêtré dans ses “tentacules”. Mais j’ai trouvé que certains aspects semblaient trop beaux… pour être vrais. Même si j’ai eu envie de croire à tout ça, je n’ai pu m’empêcher d’avoir une petite voix qui me disait que ça ne pourrait pas se passer aussi simplement.
C’est peut-être un peu dur de dire ça mais c’est mon ressenti. C’est sans doute aussi mon côté qui voit toujours “le verre à moitié vide plutôt qu’à moitié plein”.

#PourConclure

Alors certes, j’ai émis quelques réserves (comme bien souvent) MAIS ce roman m’a bouleversée. Je trouve que c’est un sujet qui mérite d’être traité (la dépression adolescente) et qui l’est ici magistralement. L’auteur connaissait très bien le problème. Cela se sent et se ressent. Il a voulu en faire quelque chose de positif, peut-être aussi pour lui-même. 
Moi, je vais en garder un souvenir ému et souhaiter que ce texte puisse aider des adolescents (et des adultes) à vaincre leurs démons.
 

#Extrait

“- Je ne voulais pas me réveiller. J’étais bien plus heureux dans mon sommeil. Et c’est vraiment triste en fait. On dirait un cauchemar à l’envers. Normalement, on est soulagé quand on sort d’un cauchemar. Mais moi, c’est dans le cauchemar que je me suis réveillé.
- Et quel est ce cauchemar, Craig?
- La vie.
- La vie est un cauchemar?
- Oui.”

p.19
 

Auteur
Editeur
Public
Date de sortie
Nombre de pages
432
Langue
Français

#VosCommentaires

#OnContinue ?

Bandiya, la fille qui avait sa mère en prison
Une grand-mère, une mère et une tante braqueuses? La vie famille de l'héroïne sort de l'ordinaire!
#bandiyalafillequiavaitsamereenprison, #catherinegrive, #fleurus
Les amours d'un fantôme en temps de guerre
"Dans le monde des fantômes, une guerre impitoyable fait rage. Des spectres malfaisants, idéologues et criminels, ont pris le pouvoir. Alors que la Résistance s'organise, un jeune fantôme, à la…
#lesamoursdunfantomeentempsdeguerre, #nicolasdecrecy, #albinmichel
Quand on dansait sur les toits Quand on dansait sur les toits



#quandondansaitsurlestoits, #tristankoegel, #didierjeunesse

Vive la différence !
"Dans la mer, il y a des grands poissons et des petits poissons."
#viveladifference, #claudiabielinsky, #casterman
Tous différents tous pareils (dossier Page des Libraires)
Parler du handicap avec humour sans tomber dans le cliché, mettre en scène la différence avec décence et sans tabou, c’est le pari réussi de Nos cœurs tordus de Séverine Vidal et Manu Causse, et…
Le passeur Le passeur

“Le vieil homme hocha la tête. Il avait l’air vidé et un peu triste.
-Monsieur ? demanda Jonas timidement.
-Oui? Tu as une question à poser?
-C’est juste que je ne…
#lepasseur, #loislowry, #ecoledesloisirs, #medium

Sous ta peau, le feu Sous ta peau, le feu

"- C'est... C'est un baiser dangereux.

- Alors je veux ce danger, cette brûlure-là. Ange, je vous aime ; je n'aime rien d'autre. J'ai l'impression d'avoir trop bu, vous êtes partout, dans…
#soustapeaulefeu, #severinevidal, #nathan, #cecilebecq

The Hate U Give
The Hate U Give ? LE roman dont tout le monde parle...
#thehateugive, #thug, #angiethomas, #nathan, #lireenlive
On m'appelle Enfant i
«Je ne vous raconterai pas mon histoire passée, plutôt celle de ma vie maintenant, ici, au camp, en commençant par aujourd'hui. Mon histoire débute ainsi...»
#onmappelleenfanti, #stevetasane, #gallimardjeunesse, #romanjunior
#ToutlemondedétesteLouise #ToutlemondedétesteLouise

“Je ramasse mes affaires et je sors de la salle en courant.
La surveillante gueule quelque chose, je m’en fous je veux sortir.
Dans la salle, personne ne parle mais j’ai l’impression…
#toutlemondedetestelouise, #anneliseheurtier, #casterman